Les pieux prédécesseurs et l’amour fou
Ibn Al-Qayyim
Une servante vint se plaindre auprès de ‘Uthmân Ibn ‘Affân d’un homme parmi les Ansâr,
et ‘Uthmân lui dit :
– Qu’as-tu ?
– Ô Commandeur des croyants ! J’ai été frappé [par l’amour] pour son neveu, et je ne cesse de l’observer. »
‘Uthmân dit à cet homme :
– Sois tu l’offres à ton neveu, sois je te donne sa valeur de mes biens.
Il répondit :
– Je te prends à témoin, ô Commandeur des croyants, qu’elle est à lui.
Nous ne renions pas la corruption de l’amour fou lié à l’accomplissement de la turpitude avec l’être chéri, et nous ne parlons que de l’amour fou chaste, de l’homme intelligent, dont la religion, la chasteté et l’honneur l’empêchent de corrompre ce qui est entre lui et Allah, et ce qui est entre lui et l’être chéri, en commettant ce qui est illicite.
Ceci à l’exemple de l’amour fou des pieux prédécesseurs et des grands imams. ‘
Ubayd Allah Ibn ‘Abd Allah Ibn ‘Utbah Ibn Mascûd, un des sept grands jurisconsultes [de Médine], connut l’amour fou au point que cela soit célèbre, et personne ne le lui a reproché, et au contraire on considérait comme injuste celui qui le blâmait.
Ainsi il dit :
Tu as dissimulé les passions au point que cela te nuise
Des gens t’ont blâmé et leur blâme est une injustice
Les gens mauvais t’ont calomnié, et avant eux
Les passions t’ont blâmé, sans que la dissimulation ne serve
Tu es comme An-Nahdî qui mourut de chagrin
Sur les traces de Hind, ou celui dont la maladie dévoile les formes
Penses-tu que parvenir à l’être aimé est péché
N’est-ce pas que l’abandon de l’être aimé est le péché
Goûte à son abandon, dont tu prétendais
Qu’il était droiture, et cette prétention fut peut-être mensongère
‘Umar Ibn ‘Abd Al-‘Azîz et son amour fou pour la servante de son épouse, Fâtimah Bint ‘Abd Al-Malik, sont célèbres. C’était une servante d’une beauté exceptionnelle, et il était séduit par elle. Il la demandait à son épouse, et insistait pour qu’elle la lui offre, mais elle refusait, alors que la servante était encore au plus bel âge. Lorsqu’il devint Calife, Fâtimah fit venir la servante, et la prépara, alors qu’elle était un modèle de beauté. Puis Fâtimah s’introduit auprès ‘Umar et dit :
– Ô Commandeur des croyants ! Tu étais séduit par ma servante, tu me l’as demandée, et je te l’ai refusée mais aujourd’hui je suis disposée à te la donner.
Lorsqu’elle lui dit cela, la joie apparut sur son visage, et il dit :
– Amène-la moi rapidement.
Lorsqu’elle s’introduit auprès de lui, il fut plus séduit encore, et il lui dit :
– Enlève tes vêtements. Elle s’exécuta, puis il lui dit : Reste où tu es. Dis-moi à qui tu appartenais ? Et comment tu es arrivé chez Fâtimah ?
– Al-Hajjâj infligea une amende à un de ses représentants à Kûfah, et j’étais esclave de ce représentant. Il me prit, m’envoya à ‘Abd Al-Malik, et m’offrit à Fâtimah.
– Et qu’est-il advenu de ce représentant ? – Il est mort. – A-t-il laissé des enfants ?
– Oui.
– Quelle est leur condition ?
– Mauvaise.
– Remets tes vêtements, et repars d’où tu viens.
Puis il écrivit à son représentant en Irak :
Envoie-moi untel fils d’untel. Lorsqu’il se présenta, il lui dit : Indique-moi toutes les amendes que Al-Hajjâj a infligé à ton père. Et il ne lui indiqua pas une amende, sans qu’il ne l’acquitte pour lui, puis on fit venir la servante qu’on lui donna, et il dit : Prends garde à elle, car ton père a sûrement souffert en raison d’elle.
– Elle est à toi, ô Commandeur des croyants.
– Je n’en ai pas besoin, achète-la moi, sinon je ne serais pas de ceux qui interdisent à leur âme de suivre ses passions.
Alors que le jeune était sur le point de partir, la servante dit :
– Et ton amour, ô Commandeur des croyants ?
Il répondit :
– Il est intact, et plus grand encore.
Et la servante demeura dans l’esprit de ‘Umar jusqu’à sa mort.
I’tilâl Al-Qulûb – 61-62. La chaîne de transmission n’est pas authentique.
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Extrait tiré du livre :
Écrit Par Ibn Al Qayyim
Pages 300/301 – Édition Tawbah
Note 4,8/5 ⭐⭐⭐⭐⭐ (selon 14 avis)
Retranscription autorisée par l’édition Tawbah.